Connaissances actuelles et recherches en cours

Le Dr. Bernard Dan nous explique en mots simples les mécanismes génétiques du syndrome d'Angelman tels que nous les connaissons aujourd’hui et nous éclaire sur les recherches en cours.

Le syndrome d’Angelman est provoqué par un défaut d’expression dans les cellules cérébrales d’un fragment d’ADN, à savoir le gène UBE3A. Ce gène est situé sur le chromosome 15. Normalement, chaque individu en possède deux copies intactes dans chaque cellule, une provenant du père, l’autre de la mère.
Cependant, le gène UBE3A est exprimé presque uniquement à partir du chromosome 15 reçu de la mère tandis que la copie présente dans le chromosome 15 reçu du père n’est pratiquement pas exprimée. C’est parce que le gène UBE3A d’origine maternelle porte une empreinte spécifique qui permet la lecture du gène, comme s’il y était inscrit « Lisez-moi ! »

 

Délétion – De nombreux individus affectés du syndrome d’Angelman présentent cette affection parce que la région contenant le gène UBE3A du chromosome 15 hérité de leur mère est absente ; on parle de délétion (del 15q11-q13).

 

Disomie monoparentale – Un autre accident génétique pouvant provoquer le syndrome d’Angelman résulte du fait que les deux chromosomes 15 proviennent du père et aucun de la mère : on parle de disomie (= deux chromosomes) paternelle (= du père) monoparentale (= d’un seul parent).

Défaut d’empreinte – Une autre anomalie possible se produit quand le chromosome 15 hérité de la mère ne porte pas l’empreinte qui indique qu’il est d’origine maternelle : on parle de défaut d’empreinte génomique.
Mutation UBE3A – Enfin, il peut y avoir une anomalie dans la séquence du gène UBE3A : on parle de mutation UBE3A.

Tous les mécanismes qui viennent d’être décrits provoquent le syndrome d’Angelman, mais on observe des fluctuations statistiques dans la gravité des symptômes en fonction du mécanisme sous-jacent. Des handicaps comme la déficience intellectuelle, l'absence de langage et l’épilepsie sont en général moins marqués chez les individus atteints de disomie monoparentale ou de défaut d’empreinte que chez ceux présentant une délétion ou une mutation du gène UBE3A.

Cette variabilité suggère la possibilité d’une expression résiduelle (quoique faible) du gène intact : par gène intact, on entend la copie du gène UBE3A qui ne porte pas le signal typique « Lisez-moi ! » indiquant normalement qu’il provient de la mère. Les patients qui ont une délétion ou une mutation possèdent une copie intacte du gène UBE3A (mais cette copie du gène est virtuellement non opérationnelle, parce que non lisibles puisqu’elles ne portent pas le signal « Lisez-moi ! »). Ceux qui présentent une disomie monoparentale possèdent deux copies intactes (mais toutes deux virtuellement non opérationnelles).

Pendant des années, plusieurs équipes ont tenté de provoquer l’expression de la copie intacte mais non-fonctionnelle, du gène UBE3A. Il y a eu des avancées importantes dans la compréhension des mécanismes qui, normalement, promeuvent l’expression du gène sur le chromosome 15 provenant de la mère. Ce signal « Lisez-moi » est lié à la méthylation de l’ADN, d’où plusieurs tentatives de traitement par modification de la méthylation restées sans succès  à ce jour.

Tout récemment, une équipe dirigée par Benjamin Philpot et Mark Zylka en Caroline du Nord (Etats-Unis) ont tenté une approche différente. Ils ont testé plus de 2000 médicaments connus sur une souris servant de modèle du syndrome d’Angelman pour voir si certaines pouvaient activer la copie non opérationnelle du gène UBE3A. Et, de fait, ils ont découverts que certains de ces médicaments sont capables d’activer la copie paternelle du gène restée déficiente. La molécule la plus prometteuse est le Topotecan, alias Topo, qui appartient à une famille de médicaments anti-cancéreux qui affectent un processus spécifique lié à l’ADN. Son utilisation médicale actuelle comme anti-cancéreux vise à tuer les cellules malades en empêchant leur réplication par modification de l’ADN. Le Topo est donc clairement un cytotoxique, ou poison cellulaire. Le fait que cette molécule peut activer le gène UBE3A fait néanmoins espérer le développement de nouvelles approches chimiques pour le traitement du syndrome d’Angelman.

De nombreuses questions doivent être résolues avant qu’on puisse affirmer si ces résultats sur des animaux peuvent s’appliquer à des humains. Par exemple : les effets de cette molécule sur l’UBE3A sont-ils stables dans le temps ? Quels effets produit-elle sur les symptômes des animaux d’expérience ? Quelles seraient les doses nécessaires ? Y aurait-il des effets secondaires ? A qui l’administrer ? Le traitement serait-il sûr et efficace chez des humains ? Ce n’est qu’ensuite qu’on pourrait envisager dans quelle mesure des molécules comme le Topo seraient à même de soulager les symptômes des individus atteints du syndrome d’Angelman.

Ce sont toutes de nouvelles questions qui soulèvent l’enthousiasme et plusieurs équipes y travaillent déjà tout en n’oubliant pas que la médecine doit avancer par étapes sur des chemins balisés et progressifs et on ne peut clairement pas lancer des tests cliniques chez des humains avant de connaître les réponses à toutes les questions préliminaires.

L’AFSA et les familles touchées par le syndrome d’Angelman ont besoin de vous. Afin de les aider, plusieurs moyens sont à votre disposition

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